La journée portes ouvertes organisée récemment par l’espace de loisirs Big Fun au Mall de Tanger, au profit d’orphelins et d’enfants en situation de handicap, a suscité une tempête de critiques. De nombreux observateurs et défenseurs des droits humains y ont vu une opération de communication et de marketing sur le dos d’une population fragile, plutôt qu’une véritable initiative humanitaire.
Cette action survient seulement quelques jours après le scandale provoqué par le refus d’entrée opposé à Sabrine, une jeune femme de 19 ans atteinte de handicap, à qui il a été reproché de pouvoir « effrayer les enfants ». L’affaire avait alors indigné l’opinion publique au Maroc et à l’étranger, dénoncée comme une humiliation flagrante et une violation des droits fondamentaux des personnes en situation de handicap.
Selon plusieurs voix, la crise aurait pu être désamorcée par de simples excuses officielles adressées à Sabrine, à sa famille et, plus largement, à toutes les personnes concernées par le handicap. Mais au lieu d’assumer ses responsabilités, la direction du centre a préféré organiser un évènement festif, largement relayé à travers des photos et vidéos sponsorisées sur les réseaux sociaux.
Des associations locales et des militants ont dénoncé une exploitation d’images d’orphelins et d’enfants autistes, utilisées comme « vitrines publicitaires » pour redorer l’image du centre, plutôt que de répondre au problème de fond.
Des sources concordantes rapportent même que la direction a diffusé une vidéo montrant Sabrine en train de jouer dans l’enceinte, tout en occultant volontairement l’échange houleux avec son père lors de son exclusion, malgré la présence de nombreuses caméras de surveillance. Une démarche perçue comme une tentative de manipulation médiatique.
Le père de Sabrine a insisté : « Ce dont nous avons besoin, ce sont des excuses officielles et la garantie que cela ne se reproduira pas, pas des campagnes publicitaires visant à améliorer l’image du centre. »
Le député fédéral belge et bourgmestre d’Evere, Ridouane Chahid, a lui aussi réagi, dénonçant une « discrimination flagrante et une exclusion injustifiée », et appelant à une enquête officielle pour éviter que de tels abus ne se reproduisent.
Le militant et influenceur Issam Siraj Eddine, lui-même en situation de handicap, a qualifié l’incident de « choc humain », ajoutant avec émotion :
« En Belgique, Sabrine bénéficie de respect, d’avantages et d’un accueil chaleureux. Dans son pays d’origine, elle est exclue sous prétexte qu’elle pourrait effrayer des enfants… Voyez comment les “pays des mécréants” traitent les personnes handicapées ❤️, et comment elles sont traitées dans nos pays musulmans . »
Des associations actives dans le domaine de l’autisme à Tanger, comme l’Union pour l’Autisme et l’Inclusion Sociale, ont exprimé leur rejet de toute instrumentalisation de la souffrance des familles, exigeant une protection légale et institutionnelle des droits des enfants handicapés, loin des campagnes saisonnières de communication.
L’ancien président de l’arrondissement Tanger-Médina a pour sa part écrit sur Facebook : « Si un tel incident s’était produit durant mon mandat et avait été confirmé, j’aurais immédiatement pris la décision de fermer le centre. »
L’affaire, désormais relayée par la diaspora marocaine à l’étranger, illustre selon de nombreux observateurs une problématique plus profonde : la tendance de certaines structures commerciales à réduire la question du handicap à des opportunités de communication, au lieu de garantir la dignité et les droits fondamentaux de tous les enfants.
Pour beaucoup, l’initiative de Big Fun s’apparente à un « indulgence marketing » : un geste symbolique destiné à masquer une faute grave, au lieu d’un véritable mea culpa.
Reste à savoir si les autorités compétentes prendront des mesures concrètes contre le centre, ou si ces campagnes publicitaires continueront de servir de paravent, au détriment de la dignité et des droits humains des enfants vulnérables.